Emile Zola, Alfons Mucha… : l’expert révèle ses trouvailles d’exception
Lundi 24 Février 2025
VENTE AUX ENCHÈRES
Lors de ses dernières expertises, comme celles qu’il tient deux à trois fois par an à Perpignan, le commissaire-priseur Jacques Farran a déniché deux nouvelles perles rares. Ou plutôt de vrais trésors d’histoire.

Jacques Farran avec une de ses dernières « pépites » dénichées en pays catalan. Charles Baron
Il est ému. Et on l’est aussi. Entre ses mains, protégée par un cadre de verre, une véritable page d’histoire, au sens propre comme au figuré. Le commissaire-priseur Jacques Farran tient là sa dernière trouvaille. Un original de la Une du journal L’Aurore du 13 janvier 1898 avec le célèbre « J’accuse…! », l’article signé par Emile Zola, sous la forme d’une lettre au Président de la République de l’époque, Félix Faure, concernant l’affaire Dreyfus. Ce dossier judiciaire à l’écho médiatique jamais égalé, qui a divisé la France et a déchaîné les élans antisémites.
« Il a été publié à 200 000 exemplaires mais c’est le tirage le plus important et le plus retentissant qui existe dans la presse en France, peut-être même dans le monde. Cette édition a la particularité d’être complète et d’être en très bon état de conservation. Elle compte parmi une collection d’une centaine d’autres numéros de L’Aurore, du Figaro de La voix du peuple et du Matin où dreyfusards et anti-dreyfusards se répondent tout au long de l’affaire qui a duré 12 ans », détaille le spécialiste montpelliérain qui tient des expertises gratuites deux à trois fois par an à Perpignan, comme ce dimanche encore à la Villa Duflot. Et œuvre à dégoter LA pièce exceptionnelle parmi les œuvres d’art, les bijoux ou même les bouteilles de vins, sur les terres catalanes d’où est originaire sa famille, avec déjà plusieurs heureux hasards à son catalogue. « Souvent, on nous appelle pour un objet et on repart avec un autre », dit-il. Un jour, il est tombé sur une aquarelle de Dali «La divine comédie » dans une armoire à Prades. L’an passé, il a déniché des correspondances épistolaires entre Salvador Dali et Puig Pujades, le célèbre Républicain de l’Empordà, mais aussi un petit format signé du peintre Albert Marquet confié par un collectionneur local qui a été vendu 232 000 euros, « le record mondial pour cette taille » .

Une œuvre de jeunesse d’Alfons Mucha. Charles Baron
Là, Jacques Farran vient de trouver son trésor « entre Perpignan et Montpellier » chez un particulier et il connaît déjà toute la genèse de cette anaphore inoubliable de la littérature française « À cette époque, Zola, icône de la littérature, n’intervenait pas dans la vie publique. Il était considéré comme un homme de gauche, qui écrivait beaucoup sur le monde ouvrier. Hugo, Balzac, Maupassant, Daudet sont morts. Et, il décide de prendre la plume pour prendre part intellectuellement à cette affaire », se plaît-il à raconter. «Après la parution, Zola a même dû s’exiler en Angleterre et tous ses biens ont été vendus aux enchères pour payer les amendes qu’il avait eues en raison de cet article. Mais cet écrit a aussi une vraie valeur poétique. Georges Clemenceau (futur président de la République), le directeur de l’Aurore, a compris cette dimension que l’on retrouve jusque dans le graphisme ». La collection sera mise aux enchères au prix de départ de 5 000 euros le 4 mai prochain lors d’une des deux ventes annuelles de l’étude de Jacques Farran à Montpellier. Et le commissaire y présentera aussi, « outre un tableau très important » tenu encore secret, son autre « perle » récemment découverte dans les Pyrénées-Orientales. Une peinture d’Alfons Mucha, le célèbre peintre illustrateur de l’actrice Sarah Bernhardt, où se dessinent les premiers traits de ce prophète de l’art nouveau. «C’est une œuvre de jeunesse, avec encore des effets plus ténébreux, qui représente une femme nue avec sa coquille », décrypte l’expert. «Des Mucha, il s’en est vendu seulement deux en France ces dernières années ». Après authentification, celui-ci pourrait être adjugé à plusieurs dizaines, voire centaines de milliers d’euros.
Laure Moysset
La vente aux enchères de l’étude Farran se tiendra le dimanche 4 mai 2025 à 14 heures au Kiasma à Castelnau-le-Lez.
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